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Mostafa El Majdoub: Un univers allégorique de grande sérénité

Bien qu’il possède le sens de la matière picturale et du geste, l’artiste-peintre Mostafa Aloumari, connu sous le nom d’El Majdoub, marque son émotion attachée à la nature et la poéticité de l’univers dans une vibration et un enchevêtrement pluri-énergique. Fasciné par les œuvres de Chaibia depuis son enfance, il s’inspire de son entourage et de son vécu pour créer des œuvres marocaines. Ses toiles de moyen et grand format présentent un univers semi-figuratif évoquant une contemplation spirituelle, avec des personnages énigmatiques et des couleurs vives. Jonglant avec plusieurs techniques, cet artiste autodidacte et poète-parolier, né en 1968 à Casablanca, aborde divers thèmes selon une dynamique tout à fait personnelle et ô combien organique.

Mostafa El Majdoub:La frénésie de l’attachement d’El Majdoub à la réalité des personnes et des choses qui l’entourent se manifeste de façon palpable dans l’ensemble de ses œuvres. Celles-ci contribuent à cette réflexion par des formes qui, tout en échappant à leur représentation, tentent de donner à l’art contemporain une nouvelle identité. La perspective, ici est de favoriser l’émergence d’une approche d’avant-garde dont le fil conducteur serait la diversité nourrie d’une même vision, d’un même élan : l’art brut. Sa palette de couleurs vibrantes et contrastées attire le regard et captive l’observateur, transportant celui-ci dans un monde à la fois mystérieux et profondément émotionnel.

Les œuvres d’El Majdoub semblent être le reflet de son âme, exprimant des sentiments universels et intemporels à travers des scènes et des visages chargés de symbolisme. Chacune de ses créations semble raconter une histoire unique, invitant le spectateur à se perdre dans les méandres de son imagination foisonnante. La spontanéité gestuelle, les personnages (souvent féminins) réduits à une représentation à la fois illustrative et allégorique, l’emploi intuitif des couleurs dans un agencement sans artifice. En somme, il s’agit d’une composition née d’une sensibilité libérée de tous les clichés de la pensée académique, où le plaisir de peindre, vécu jusqu’à l’euphorie, est pris tel quel à la racine et affiche un langage plastique ne s’encombrant guère d’étiquettes.

Si la référence à l’art de Chaïbia Talal dénote parfois dans le travail d’El Majdoub, au point de parler d’un rapport maître/disciple, après maints échanges dans l’observation et l’exécution du travail, sa peinture est devenue petit à petit plus personnelle. Et surtout plus libérée de son idole, en termes de motifs et de la façon de les concevoir et de les poser, de gammes et de lumière. L’artiste introduit une technique phosphorescente qui, à des degrés plus ou moins prononcés, opère des changements d’effets et de nuances surprenants sur la toile. Cela impacte la vision et crée, selon l’angle d’observation, l’illusion de voir toujours quelque chose de différent et d’unique. Une expérience qu’Al Majdoub a partagée lors de ses nombreuses expositions et rencontres d’art un peu partout.

L’expression juste de son sentiment devant le sujet compte à présent bien plus que le sujet lui-même. Sa recherche va vers une liberté plus grande et plus inventive dans le geste et évolue vers une cohérence chromatique. Où que l’on se tourne, des formes se bousculent, en cascades, en diagonales, pour passer outre le bord des toiles et venir plus près de nous encore accaparer nos yeux. Parfois, l’animation se calme : ces arrêts sur image s’offrent alors comme de très gros plans.

Dans ces répits laissés au regard, soudain un éclair de conscience nous éblouit. Pour le reste, la suggestion l’emporte sur la certitude. Au contemplateur de s’y retrouver. Chez El Majdoub, cela s’exprime surtout par une composition qui génère du sens sans se référer directement au concret tout d’abord. Ensuite, par une idéalisation des formes et des traits qui permettent la représentation d’un tel ou tel sujet. Par cela, le sujet n’est plus un simple prétexte visuel, y compris la silhouette, mais une allégorie, un discours pictural implicite.

À ce titre, il est très important de rappeler que, dans ce processus de réalisation, El Majdoub a toujours produit des compositions plastiques harmonieuses et a imposé un certain équilibre dans sa démarche. Il est un artiste, comme un voyageur qui, pour la première fois, effectue un voyage vers une destination inconnue, via un certain itinéraire. Il sait qu’il est censé marcher, mais ne sait pas ce que le voyage lui réserve comme paysages. C‘est seulement, une fois que le voyage est terminé qu’il peut décrire ce qu’il a fait et ce qu’il a découvert durant son itinéraire. Ainsi l’autonomie et l’indépendance de l’œuvre de notre plasticien lui permettent de s’exprimer indépendamment de lui.
De ce procédé créatif cherchant un équilibre entre la nécessité du contrôle et le défi de l’impromptu se dégage une grande sérénité et zénitude. C’est dire que l’œuvre d’El Majdoub favorise à la fois l’aspect extérieur par son harmonie des formes et des couleurs, et la résonance intérieure, celle de l’âme.

Ayoub Akil

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