La peinture du plasticien marocain Ahmed El Houari, toute en subtilité de couleurs et de formes, dévoile une imagination foisonnante. Chez ce natif d’Agadir en 1974, l’essentiel fluide et chromatique mène vers un cubisme lyriquement chaleureux. Et c’est nettement perceptible dans ses œuvres récentes qu’il projette d’exposer prochainement.
Les œuvres récentes de cet artiste, vivant et travaillant à Casablanca, découlent certes de ce cubisme mais, pour lui, ce qui importe, c’est que le public reçoive son travail comme un acte sincère qui transforme la vision au quotidien. D’où sa peinture , peu à peu transcendée et alchimisée par une expression volontaire faite de décision, de liberté et d’émotions, dans des compositions bien recherchées, qui permettent à l’artiste de s’affranchir du réel classique, au profit d’une réalité moderne, dynamique et attachante par sa singularité.
S’appuyant sur plusieurs techniques, il se tourne résolument vers le cubisme, fruit de son talent approfondi qui réagit à la couleur et à la forme avec hardiesse et de façon décisive, dans une plénitude artistique qui réfléchit sa personnalité avec brio au fil de ses créations… Ses thèmes sont divers et variés mais hautement philosophiques : la condition de l’homme, la vie, le bonheur, la fatalité du destin, l’optimisme, la perpétuelle quête intérieure de soi…
Techniquement, il faut admettre que chez ce plasticien dans l’âme, la précision gestuelle des silhouettes et des traces est étonnante d’harmonie, d’originalité et d’analyse, tout comme le sont les motifs lyriques singularisés par des couleurs intrinsèques et parfois audacieuses, dans des œuvres généreuses dont la discrète sensualité se perçoit néanmoins… Ceci est vrai tant par cet art non figuratif qu’il nous donne à voir aujourd’hui et qui se révèle d’une grande innovation.
Après maints échanges dans l’observation et l’exécution du travail, sa peinture est devenue petit à petit plus personnelle et plus libérée. Une expérience qu’Ahmed a partagée lors de ses précédentes expositions et rencontres d’art au Maroc comme à l’étranger depuis plus de deux décennies. «L’expression juste de mon sentiment devant le sujet compte à présent bien plus que le sujet lui-même. S’élever, transcender, éclairer, sublimer… voici les raisons de peindre et de vivre pour moi», indique Ahmed EL Houari Une véritable leçon de vie, un sacré voyage intérieur!
Sa recherche va vers une liberté plus grande et plus inventive dans le geste et évolue vers une cohérence chromatique. Aboutissement: une peinture alléchante, riche en saveurs. Où que l’on se tourne, des formes se bousculent, en cascades, en diagonales, pour passer outre le bord des toiles et venir plus près de nous encore accaparer nos yeux. Parfois, l’animation se calme : ces arrêts sur image s’offrent alors comme de très gros plans. Dans ces répits laissés au regard, soudain un éclair de conscience nous éblouit. Pour le reste, la suggestion l’emporte sur la certitude. Au regardeur de s’y retrouver.
Chez Ahmed El Houari, le cubisme s’exprime surtout par une composition qui génère du sens sans se référer directement au concret tout d’abord. Ensuite, par une idéalisation des formes et des traits qui permettent la représentation d’un tel ou tel sujet. Par cela, « le sujet n’est plus un simple prétexte visuel, y compris la silhouette, mais une allégorie, un discours pictural implicite», poursuit-il.
C’est dire que la peinture est pour lui un langage au sens strict, qui ne se contente pas de chercher la trace du monde tel qu’il s’offre à nos yeux candides. Couleurs neutres, telluriques, subtiles ou éclatantes, peu importe, le but ultime de notre plasticien est de créer des espaces harmonieux et dynamiques où il y a toujours un silence qui parle.
Dans ses œuvres récentes, l’on devine aussi les gestes vifs et simples que l’on retrouve dans toutes les pièces, les traces de peintures traduisent. Chacune de ses œuvres change la perception de l’espace comme l’artiste questionnait comment la peinture peut faire paysage par l’intensité des couleurs et du geste qui, pour lui, doit être généreux et dont la simplicité de l’acte doit inspirer le contemplateur.
Cette interaction nous apprend à comprendre ce que nous ne pouvons percevoir qu’à travers la réflexion, la méditation et la contemplation. Et au delà de la singularité, l’œuvre d’Ahmed El Houari ajoute une couche supplémentaire sur toutes les réflexions et les idées délivrées dans l’aspect spirituel dans l’art et dans la peinture en particulier. De l’importance des formes à la symbolique des couleurs, il s’agit ici d’une théorie artistique à part entière, mais aussi d’une clé de lecture afin de pouvoir mieux apprécier le travail de notre artiste.
Ayoub AKIL